Pivot culturel et de sociabilité de la Cité-jardins de Suresnes, l’une des plus importantes d’Île-de-France, labellisée « Patrimoine d’intérêt régional » en 2018, le Théâtre de Suresnes Jean Vilar participe de l’histoire sociale et urbaine des banlieues de l’entre-deux-guerres ainsi que de l’histoire d’un théâtre populaire et exigeant.

Un théâtre né des nouvelles conceptions urbanistiques pour les banlieues

Formulé à la fin du XIXe siècle en Angleterre par des architectes urbanistes préoccupés du développement harmonieux des banlieues et de l’habitat social dans des sociétés bouleversées par la révolution industrielle, le concept de garden cities connaît un vif succès en Europe au début du XXe siècle.

En France, les Cités-jardins sont créées à partir de 1905. Henri Sellier, élu maire de Suresnes en 1919, fait de sa ville le terrain privilégié d’un nouveau projet urbain et social et lance la construction de la Cité-jardins de Suresnes en 1921. Nommé à l’époque Centre de loisirs Albert-Thomas, le Théâtre de Suresnes, lieu symbolique de socialisation et d’éducation, structure la cité. Il en est à la fois le « poumon » et le « monument » selon les termes de son architecte.

Un théâtre pour le TNP de Jean Vilar

En 1951, Jean Vilar, tout juste nommé directeur du Théâtre National Populaire, ne peut s’installer au palais de Chaillot qui accueille alors l’assemblée générale de l’ONU. Il choisit le Théâtre de Suresnes pour héberger sa troupe et assurer ainsi les premières représentations du Cid avec Gérard Philipe, et créer, le 18 novembre 1951, Mère Courage de Brecht.

Premier « bastion dramatique » de son projet de « tournées en banlieues », le Théâtre de Suresnes permet à Jean Vilar de créer une nouvelle façon de faire du théâtre et de lancer des week-ends artistiques dont le premier a lieu les 17 et 18 novembre 1951. Ceux-ci mêlent concerts, théâtre, conférences-dialogues avec les acteurs du TNP et bal.

Ces week-ends artistiques connaissent un véritable engouement et attirent Suresnois, Parisiens et au-delà. Outre Gérard Philipe et Maria Casarès, viennent y participer Maurice Chevalier, Yves Montand, Aragon et Elsa Triolet, Armand Salacrou, René Clair, Jean Cocteau, Patachou…

Le Théâtre de la Cité-jardins de Suresnes — qui prendra le nom de Jean Vilar en 1971 — témoigne ainsi de l’engagement à la fois social et politique du créateur du Festival d’Avignon, pour qui l’art et la culture sont au cœur de la cité.

De 1990 à aujourd’hui : un Théâtre au cœur de la cité, généreux, ouvert et exigeant

En 1986, le Théâtre de Suresnes est fermé. Christian Dupuy, maire de Suresnes depuis 1983, souhaite réhabiliter et mettre aux normes de sécurité le bâtiment et améliorer les conditions d’accueil du public.

C’est dans ce contexte de rénovation, qui débute en mai 1990, que Christian Dupuy nomme Olivier Meyer directeur du Théâtre de Suresnes. En choisissant son projet, la Ville de Suresnes entend favoriser une programmation ambitieuse sur le plan artistique et ouverte au plus large public. Elle souhaite impulser une véritable politique artistique associant production et accueil de nombreux spectacles.
La Ville de Suresnes accorde le statut d’autonomie juridique et financière au Théâtre en créant une société d’économie mixte pour sa gestion. Aujourd’hui, le Théâtre de Suresnes Jean Vilar poursuit ces objectifs de programmation alliant générosité, humanisme, exigence dans le choix des œuvres et des créations, audace artistique, émotion et intensité, ouverture sur la pensée et la réflexion, diversité.

Chaque saison, depuis 1990, le Théâtre de Suresnes Jean Vilar affirme, avec toute une équipe experte et passionnée, sous la houlette de son directeur et programmateur Olivier Meyer, son ouverture, son audace et son désir de rencontres entre différents univers artistiques pour faire naître de nouvelles productions et proposer une centaine de représentations à destination de tous les publics.
Ce sont donc des saisons rythmées par le théâtre, la danse classique ou contemporaine, le hip hop, la musique classique, le jazz, le cirque, le théâtre musical… qui se déploient dans les salles Jean Vilar et Aéroplane.

En 1993, Olivier Meyer crée le festival Suresnes Cités Danse. Né de la rencontre, en juillet 1991, avec Doug Elkins, jeune chorégraphe new-yorkais et hip hoper, le Festival est dédié aux danses urbaines et se veut laboratoire d’expérimentation et d’idées favorisant de nouvelles formes chorégraphiques. Au fil de ses éditions, Suresnes Cités Danse a donné ses lettres de noblesse à la danse hip hop et offert un rayonnement non seulement en France mais aussi à l’international à de nouvelles propositions chorégraphiques.
Dès ses débuts, le Festival a permis, dans un éloge du métissage, des créations hybrides, des rencontres inattendues entre le hip hop et d’autres langages chorégraphiques : danse contemporaine avec les chorégraphes José Montalvo et Dominique Hervieu, Pierre Rigal, Denis Plassard, Blanca Li, Laura Scozzi ou encore Robyn Orlin, Angelin Preljocaj ; danse classique avec Marie-Agnès Gillot, Jérémie Bélingart ; mais aussi tous les univers musicaux, du rock au jazz en passant par la musique baroque.

Olivier Meyer s’est attaché à accompagner et à faire émerger toute une génération de danseurs hip hop, de chorégraphes comme Mourad Merzouki, Farid Berki, Kader Attou, Mickaël Le Mer… Il les a fait venir sur la scène du Théâtre de Suresnes Jean Vilar, a rendu visible et accessible le meilleur de la danse des cités et a donné droit de cité à de nouvelles formes de danse.

Un nouvel outil technique au service d’une ambition artistique et du rayonnement du Théâtre

Le 3 février 2020, après neuf mois de travaux de rénovation, de mise aux normes et de réaménagements de la scène de la grande salle, des coulisses, du foyer des artistes et de tous les espaces techniques et artistiques de l’arrière-scène, le Théâtre de Suresnes Jean Vilar rouvre ses portes. Sous l’impulsion de la Ville de Suresnes, de son maire Christian Dupuy et d’Olivier Meyer, directeur du Théâtre Jean Vilar, avec le soutien de Valérie Pécresse pour la Région Île-de-France et de Patrick Devedjian pour le Département des Hauts-de-Seine, cette rénovation permet d’inscrire durablement cette scène reconnue de l’Ouest parisien dans le paysage culturel francilien et national.

Un espace scénique agrandi et homogène
L’objectif principal de ces travaux était l’aménagement des espaces intérieurs de façon plus cohérente. Il s’agissait notamment d’agrandir et d’homogénéiser le plateau pour l’adapter aux contraintes et exigences des spectacles actuels de danse, de musique et de théâtre.
À sa création en 1938, la scène était de petite dimension, 10 mètres de large sur 7 mètres de profondeur. En 1990, la Ville de Suresnes et son maire Christian Dupuy décident une première réhabilitation du bâtiment, classé à l’inventaire des Monuments Historiques, et une modernisation de la salle afin de la rendre plus confortable pour le public et d’améliorer son acoustique. Le balcon est supprimé et la salle est aménagée en gradins. Afin d’agrandir la scène, une avant-scène est construite. Mais avec ses désormais 14,5 mètres de mur à mur, le plateau reste de dimension modeste, avec peu d’entrées de scène pour les artistes, très peu d’espaces pour les coulisses et pour le stockage des décors.

Avec les travaux entrepris en 2019, le plateau devient homogène entre l’avant et l’arrière-scène avec une ouverture au cadre de 13 mètres, une profondeur de 14 mètres et 22 mètres de mur à mur. Le parquet est entièrement refait et offre un accès facilité aux dessous de scène. 8 « rues » permettant les entrées et sorties de scène des artistes sont aménagées. La surface de cette nouvelle scène, constituée d’un seul et même espace, est quasiment multipliée par trois.

De nouveaux espaces pour les coulisses et le stockage des décors

Dans cette reconfiguration de la cage de scène sont aménagés 4 mètres de coulisses, de chaque côté du plateau, ce qui facilitent la circulation des artistes et le stockage des décors et des accessoires.

Un meilleur accueil des artistes grâce à des loges et un foyer plus fonctionnels

L’arrière-scène a également été modifié en déplaçant le mur de l’étroit couloir existant. Il y a donc désormais, au niveau du plateau deux loges et un foyer pour les artistes.

Une machinerie scénique modernisée et informatisée

Ces travaux de réaménagement ont été l’occasion de repenser et de moderniser toute la machinerie scénique. Celle-ci est entièrement électrifiée et informatisée. Pour réaliser cette informatisation de l’appareillage technique, la structure qui constitue le plafond de scène et les passerelles d’accès des techniciens (le gril) a été complètement refaite.

Un réaménagement mis aux normes et soucieux d’améliorer l’accès aux personnes à mobilité réduite

Dans le cadre de ces travaux de modernisation, la Ville de Suresnes s’est attachée à une remise aux normes de sécurité et d’accueil des personnes en situation de handicap. L’accès des personnes à mobilité réduite ou en fauteuil roulant est amélioré et l’espace a été aménagé dans ce sens au premier rang de salle.

Un Théâtre fort de son passé, inscrit dans le présent et tourné vers l’avenir

Parce qu’il est essentiel de favoriser l’expression libre de l’art et de la culture et parce que dans la lignée de l’héritage du TNP, l’ambition du Théâtre de Suresnes Jean Vilar est de toujours cultiver l’exigence artistique pour tous les publics. Les saisons s’articulent entre fidélité aux artistes et découvertes de talents émergents dans tous les domaines du spectacle vivant. C’est notamment grâce aux travaux de 2019 que peut se poursuivre et s’amplifier cette ambition. Ce sont et seront toujours les artistes qui demeurent au cœur de la représentation mais avec des possibilités techniques qui permettent d’accueillir de nouvelles formes de création.