• Saison 2016-2017
Salle Aéroplane
1h30
Dès 15 ans
Création

D’Henri Pichette
Mise en scène Pauline Masson

Plaidoyer pour la jeunesse et la force absolue de la poésie, Les Épiphanies d’Henri Pichette, auteur de génie et compagnon de théâtre de Jean Vilar, ont été crées en 1947, au lendemain de la guerre, par Roger Blin, Maria Casarès et Gérard Philipe.

Ce poème, plein de souffle et de révolte, est composé de cinq parties — la Genèse, l’Amour, la Guerre, le Délire, l’Accomplissement — et de trois personnages principaux : le Poète, armé d’une magnifique rage de vivre et d’aimer, son Amoureuse, Ève lyrique et sensuelle, et Monsieur Diable, incarnation du mal, bien décidé à asséner aux amoureux une terrible leçon de lucidité. Pour rendre vivant, pour donner corps à ce texte urgent, cathartique et lumineux, qui est un véritable antidote contre le désenchantement, Pauline Masson, jeune metteure en scène passionnée par ce poème, a choisi trois acteurs rares de sa génération.

Avec
Monsieur Diable Gabriel Dufay
L’Amoureuse Élodie Huber
Le Poète Stanislas Roquette

Regard chorégraphique et collaboration artistique Corinne Barbara
Scénographie Delphine Sainte-Marie
Création son Bernard Vallery
Création lumières Mathilde Chamoux

« Je respire mieux quand je vous lis » Gaston Bachelard à Henri Pichette, 1958.

Les Épiphanies, texte sans aucun doute pensé pour la scène – puisqu’Henri Pichette les a écrites dans le but de les voir jouées par Gérard Philipe – destiné à être dit, interprété, ne ressemble à aucun autre.
Poème dramatique ? Drame poétique ? Opéra bouffe ? Épopée picaresque ? On ne sait. Les Épiphanies créent un genre à elles toutes seules, et ne se laissent enfermer dans aucune catégorie.
L’appétit verbal, la chatoyance et l’irrévérence de la langue évoquent tout autant Rimbaud, que Rabelais, ou encore, plus proche de nous, Valère Novarina. Quant à la structure en cinq Épiphanies soient cinq actes, elle rappelle les tragédies antiques, mais également le Pentateuque.
L’inspiration chrétienne du poème est d’ailleurs revendiquée – quoique de manière ambiguë et insolente – par son sous-titre : Mystère profane. Les Épiphanies sont donc un mystère sans Église, un mystère sans Dieu institué. C’est la poésie qui y est célébrée, et la foi et l’espérance sont placées en l’homme, ou plutôt en un homme : le Poète, avec sa rage de vivre et d’aimer, immédiat et frondeur, accompagné de son Amoureuse, Ève lyrique et on ne peut plus sensuelle. Face à eux, leur apparent contraire : Monsieur Diable, cynique et blasé, gouailleur et revenu de tout, bien décidé à leur asséner une âpre leçon de lucidité, et ce par tous les moyens à sa disposition. Dans l’arène, s’affrontent férocement exaltation et déception, appétit et dégoût, naïveté et amertume, deux visions de l’existence a priori inconciliables.
Mais, si elles peuvent paraître diamétralement opposées, les deux figures du Poète et de Monsieur Diable demeurent inextricablement liées, comme le sont Jekyll et Hyde. Ils se ressemblent même étrangement, chacun défendant ses convictions avec la même ardeur et le même pouvoir de séduction, chacun étant traversé par le doute, chacun étant fasciné par l’autre, chacun ayant intimement besoin de son contraire pour affirmer son existence. Ce qui les sépare est ce qui les rejoint, l’un se définissant en réaction à l’autre.
Les Épiphanies, de par la gémellité en apparence contradictoire des deux personnages masculins principaux, explorent ainsi un autre genre de mystère (sens second à donner à leur sous-titre) : celui de la zone grise qui existe en chacun de nous, celle-la même qui contribue à la complexité des êtres. Cet espace flou, que nous portons tous en nous, au sein duquel s’épanouissent nos doutes, nos regrets, nos impulsions, nos fantasmes inavouables, nos aspirations inavouées, nos tentations, nos manques, nos frustrations. Cet enfer intime, où se côtoient les meurtres que nous n’avons pas pu commettre et les personnes que nous n’avons pas pu sauver.
En d’autres termes, les frémissements cachés, qui impliquent que personne, jamais, ne peut être unilatéralement « bon », ou « méchant », ou « naïf », ou autre catégorisation réductrice.
Monter cette pièce aujourd’hui constitue un acte de résistance, contre le rationalisme à toute épreuve, contre les calculs d’apothicaire, contre la froideur des élans, contre l’éternelle et persistante crainte de mal faire, de mal dire, de mal penser, de mal être, de mal être vu, de mal commencer, de mal finir, contre le « c’était mieux avant » et contre l’appréhension des lendemains.
Avant tout, je souhaite redonner ses lettres de noblesse à Henri Pichette, auteur « notoirement méconnu » (pour reprendre l’expression d’Alexandre Vialatte à propos de lui-même), et aux Épiphanies en particulier.
 Et, très humblement, j’espère que ce spectacle pourra permettre à chaque spectateur de respirer mieux.

Pauline Masson

Pauline Masson

Lors de ses deux premières années d’étude au premier cycle franco-allemand de Sciences-Po Paris, Pauline Masson gère l’association théâtre du campus. Elle travaille la première année autour d’Électre de Sophocle, puis la seconde autour des Diablogues de Roland Dubillard, avec neuf comédiens amateurs de différentes nationalités, aboutissant à un spectacle qui sera représenté à Vienne (Autriche) et à Nancy. Puis, toujours en parallèle de ses études, elle se forme à l’art de l’interprétation, successivement en Allemagne (cours dispensés par la Ruprecht-Karls-Universität d’Heidelberg), et en France (Ecole Philippe M), formation qu’elle perfectionne aujourd’hui au cours de stages avec des professionnels (École du jeu – Delphine Eliet).
S’engageant un temps dans l’administration (attachée de production et administratrice de tournée au Théâtre Vidy-Lausanne de 2009 à 2011, chargée du mécénat au Festival d’Automne à Paris en 2011), elle suit notamment l’Opéra du Sichuan en tournée pour le spectacle Flowers in the Mirror (mise en scène Charles Tordjman, tournée en 2010 en Suisse, au Luxembourg et en France, notamment au Théâtre Nanterre-Amandiers), ainsi que Pierre Étaix pour son spectacle Miousik Papillon (création Théâtre Vidy-Lausanne en 2010, tournée en France sur les saisons 2010-2011 et 2011-2012).
Par amour pour les textes, avec une préférence pour les textes contemporains et une inclinaison pour les auteurs méconnus des XXe et XXIe siècles, Pauline Masson se tourne résolument vers la mise en scène en 2012 et assiste Charles Tordjman sur la création du spectacle Résumons-nous (adapté des Chroniques de la Montagne d’Alexandre Vialatte) de janvier à avril 2012 (tournée en France en 2013-2014), et plus tard sur la création de L’être ou pas (pour en finir avec la question juive) de Jean-Claude Grumberg (création en février 2015, reprise en 2015-2016). Elle assiste aussi Marie-Louise Bischofberger pour la création d’Une petite douleur d’Harold Pinter de mai à novembre 2012. En 2013, elle collabore à la création d’Ylajali de Jon Fosse, mis en scène par Gabriel Dufay (tournée en France de mai 2013 à avril 2014), puis assiste le marionnettiste et metteur en scène tchèque Matěj Forman au cours de la création du spectacle Un beau matin, Aladin inspiré des Mille et Une Nuits (tournée en France de novembre 2013 à mai 2014, reprise en 2014-2015). Elle collabore à la mise en scène et joue dans le spectacle Journal d’une apparition, d’après Robert Desnos, mis en scène par Gabriel Dufay au Théâtre National de Chaillot (création en octobre 2015). Elle travaille actuellement à la mise en scène des Épiphanies d’Henri Pichette, et prépare l’adaptation pour le théâtre du roman L’histoire d’un mariage d’Andrew Sean Greer.

 

Stanislas Roquette

Né en 1984, titulaire d’une maîtrise de Sciences Politiques, Stanislas Roquette est comédien, metteur en scène, et enseignant à Sciences-Po Paris pour des ateliers de pratique théâtrale et de prise de parole en public. Au Festival d’Avignon 2013, il met en scène La machine de l’homme, création sur le rapport de Jean Vilar au personnage du Dom Juan de Molière, spectacle repris en tournée sur la saison 2014-2015.
Nominé pour la révélation théâtrale au Prix du Syndicat de la Critique 2012, il a récemment joué dans Le fils de Jon Fosse (mise en scène Jacques Lassalle), Qu’est-ce que le temps ? (le livre XI des Confessions de Saint Augustin) et Artaud-Barrault (mises en scène Denis Guénoun), L’inquiétude de Valère Novarina (« Sujet à vif » avec Céline Schaeffer, Avignon 2012), et Mai, juin, juillet de Denis Guénoun (mise en scène Christian Schiaretti, TNP, et reprise au Festival d’Avignon 2014). Il interprète Lorenzaccio dans la pièce de Musset mise en scène par Gérald Garutti en 2015, et joue dans Aux corps prochains, spectacle inspiré par la pensée de Spinoza, dont il a assuré la conception aux côtés de Denis Guénoun (création au Théâtre National de Chaillot en mai 2015, reprise au TNP).

[COLUMN]

Elodie Huber

Après un cursus au Studio Théâtre d’Asnières et à la William Esper Studio aux Etats-Unis, Elodie Huber a travaillé entre autres sous la direction de René Loyon dans La Mouette et le Tartuffe, Julien Balageas dans Psyché, Denis Podalydès dans Cyrano de Bergerac et Le Bourgeois Gentilhomme, Marion Delplancke dans La Surprise de l’amour et Christian Fromont dans Flûtes !
Au cinéma elle a participé aux Talents Cannes 2010 sous la direction de Christophe Lioud (Bonne Pioche) et de Bruno Podalydès dans Dieu Seul me voit et Bancs Publics. Côté court-métrages, elle joue depuis plusieurs années dans les films d’Olivier Riche et Nina Chataignier.
Par ailleurs, elle participe régulièrement à l’enregistrement de livres audios, de fictions pour France Culture et de documentaires pour Arte.

 

Gabriel Dufay

Après des études littéraires en hypokhâgne et khâgne au Lycée Fénelon, Gabriel Dufay poursuit des études de théâtre en tant que comédien à l’Ecole supérieure d’art dramatique de la Ville de Paris (ESAD) puis au Conservatoire national supérieur d’art dramatique (CNSAD), promotion 2007. Au théâtre, il a joué notamment pour Jean-Paul Wenzel (Les bas fonds, La jeune fille de Cranach), Christophe Rauck (Intendance), Wajdi Mouawad (Littoral), Jean-Baptiste Sastre (Un chapeau de paille et d’Italie), Michel Didym (Frangins), Emmanuel Bourdieu et Denis Podalydès (L’homme qui se hait), ainsi que dans ses propres mises en scène (Push Up, Ylajali et Journal d’une apparition). Il travaille également pour la radio (France Culture et France Inter) et participe régulièrement à des lectures à la Villa Médicis, à la Librairie des Abbesses, au Centre Culturel Français à Héliopolis – Le Caire, au Musée de la Grande Armée, au Musée d’Orsay, à la Société des Gens de Lettres, au Musée du Luxembourg, à la Cinémathèque, au Théâtre du Rond Point…
A l’écran, il incarne entre autres Louis XVI en 2011 dans Louis XVI – L’homme qui ne voulait pas être roi, réalisé par Thierry Binisti, et joue en 2012 dans Vous n’avez encore rien vu, réalisé par Alain Resnais.

Coproduction Théâtre de Suresnes Jean Vilar, Compagnie Incandescence. Avec le soutien de la Compagnie Fabbrica. Remerciements à Jacques Téphany et à la Maison Jean Vilar, au TNP Villeurbanne, à Marc Sussi et au JTN, au Théâtre du Châtelet, à la SACD et à la Maison des Auteurs, à Joël Huthwohl, Jean-Loup Graton et à la BNF, à Marie-Françoise George, Colette Nucci, Christine Goémé, Marie-Hélène et Jean-Pierre Dufay, Monique Piot et Cidalia Da Costa.