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D’après Vaslav Nijinski
Mise en scène Brigitte Lefevre et Daniel San Pedro

Vaslav Nijinski fut le plus grand danseur de son temps, avant de sombrer dans la folie, à l’âge de trente ans. Exclu des Ballets Russes, en 1913, par Serge Diaghilev (jaloux de son mariage avec la jeune danseuse hongroise Romolà de Pulszky), il réintègre la troupe à partir de 1916. À l’hiver 1918, il écrit, sur de petits cahiers, le témoignage bouleversant d’une vie de création faite de gloire et de souffrances, quelques mois avant d’être interné en hôpital psychiatrique en mars 1919, où il passera les trente dernières années de sa vie.

Nijinski raconte la vie, la mort, les sentiments, Diaghilev, la douleur, Dieu, la danse à en perdre la raison. Celui qui maîtrisait à la perfection cet art de l’équilibre propre aux plus grands danseurs, celui qui émerveillait le public par des sauts d’une grâce et d’une puissance jamais vues, vacille irrémédiablement, bascule comme à l’intérieur de lui-même.

Sur une scénographie constituée d’un plancher incliné, Daniel San Pedro et Brigitte Lefevre mettent en scène ce monologue en dédoublant le personnage de Nijinski : un comédien et un danseur interprètent la figure de ce danseur d’exception pour évoquer l’univers mental de Nijinski, sa quête de vérité, ses pensées.

Texte français et adaptation Christian Dumais-Lvowski

Avec Clément Hervieu-Léger, de la Comédie-Française et Jean-Christophe Guerri, de l’Opéra de Paris

Scénographie Brigitte Lefevre et Daniel San Pedro

Assistés de Camille Duchemin

Les Cahiers de Nijinski sont emprunts de mystère et permettent différentes interprétations scéniques, différentes possibilités d’envisager sa personnalité. Dans sa manière même de s’exprimer et d’écrire, Nijinski se fuit en permanence, tout signale qu’il ne veut jamais être attrapé. D’emblée nous avons voulu souligner cette multiplicité par un partage, une multiplication identitaire. Très vite j’ai souhaité également un deuxième acteur dans ce projet, Jean-Christophe Guerri. Si l’aventure est multiple comme le personnage de Nijinski, il n’est pas question ici que Clément et Jean-Christophe soient les doubles de Nijinski, au contraire, il faut faire entendre une voix, des corps et leur rencontre. Une tentative permettant de rendre palpable ce qu’on ne sait pas ou que l’on ne voit pas.
J’ai été touchée par son désir de résister à son entourage. Danser c’est créer l’espace bien au-delà de ce que nous pouvons être. Lorsque vous dansez, il n’y a pas d’espace assez grand. Qu’a-t-il pu ressentir alors dans son enfermement clinique…?

Brigitte Lefevre

 

L’idée était de réunir les mondes du théâtre et de la danse pour évoquer le plus grand danseur de son époque au moment où il arrête de danser. Nous ne voulions pas que Jean-Christophe Guerri danse et que Clément Hervieu-Léger joue pour illustrer ces deux mondes. Nous souhaitions simplement croiser les deux univers.
Ce qui m’intéressait était le point de déséquilibre, au moment où le corps de Nijinski ne suit plus, où sa tête se met à basculer dans la folie. Il se met à écrire, frénétiquement. Son corps ne bouge plus, mais sa tête, son coeur, tout ce qui est à l’intérieur de lui se met à vibrer, à s’agiter. Comme s’il se libérait de tous ses affects, de toutes ses idées, sans pouvoir s’arrêter.
Quand on connaît l’importance du point d’équilibre pour un danseur, Nijinski tout à coup va éprouver l’extrême inverse. Déséquilibre dans sa vie personnelle, car il se retrouve entre les mains d’un médecin qui était l’amant de sa femme. Déséquilibre professionnel dans la mesure où il échappe à ceux qui l’ont vampirisé.

Daniel San Pedro

 

 

Brigitte Lefevre

Entrée à huit ans à l’École de danse de l’Opéra de Paris, Brigitte Lefevre est engagée à seize ans dans le Corps de ballet. Durant ses années à l’Opéra, elle suit l’enseignement de Serge Peretti, Yves Brieux, Serge Perrault, Harald Lander… et d’Yvette Chauviré, à qui elle voue une grande admiration. Elle interprète les ballets de George Balanchine, Roland Petit, Maurice Béjart, Michel Descombey, Gene Kelly, sans oublier les grands ballets classiques. Très tôt intéressée par les différentes techniques de danse, elle suit les cours de jazz et de danse contemporaine avec Gene Robinson, Alwin Nikolaïs, Merce Cunningham et Paul Taylor.

En 1970, elle crée sa première chorégraphie Mikrocosmos (sur une musique de Bartók) pour Jacques Garnier, Michaël Denard et elle-même, ballet qui sera présenté dans la Cour d’Honneur au Festival d’Avignon. En 1972, elle décide de quitter, avec Jacques Garnier, l’Opéra pour fonder le Théâtre du Silence et à cette même période, est sollicitée par Jean Mercure pour être Lisa dans Les Possédés d’Albert Camus, d’après Dostoïevski, qu’il met en scène au Théâtre de la Ville. Parallèlement, elle réalise plusieurs chorégraphies pour la comédie musicale et le théâtre – dans des mises en scène
de Jean-Michel Ribes, Jean Mercure et Serge Peyrat – au Théâtre de la Ville. Elle chorégraphie également La Révolution Française au Palais des Sports.
En 1974, le Théâtre du Silence s’implante à la Rochelle avec pour projet, tout en faisant de grandes tournées nationales et internationales (Japon, Brésil, États-Unis…), de s’adresser à un public peu familier du monde de la danse en allant dans les écoles, dans les hôpitaux et dans des lieux où la danse n’avait pas droit de cité. Le Théâtre du Silence sera une des premières compagnies de danse implantées en France et outre leurs propres créations, les deux chorégraphes enrichissent le répertoire de la compagnie par des oeuvres de Merce Cunningham, David Gordon, Robert Kovitch, Lar Lubovitch, Andy Degroat. Au départ de Jacques Garnier (1980), elle assume seule la direction de la compagnie jusqu’en 1985.

Elle est sollicitée par le Ministère de la Culture pour devenir Inspecteur principal de la Danse (Direction de la Musique et de la Danse) en 1985, puis Inspecteur général et première « Déléguée à la Danse » en titre jusqu’en 1992. En septembre 1992, elle est appelée par Jack Lang et Pierre Bergé pour devenir Administrateur Général de l’Opéra Garnier puis, en février 1994, Directeur-adjoint chargé de la danse, aux cotés de Jean-Paul Cluzel. Le 1er juillet 1995, elle est nommée Directrice de la Danse de l’Opéra National de Paris par Hugues Gall.
Brigitte Lefevre s’attache alors à construire un répertoire vivant qui puisse se conjuguer au passé, au présent, mais aussi au futur. Tout en accordant une place importante à la tradition et au maintien des grands ballets classiques – et plus particulièrement les productions de Rudolf Noureev – elle programme régulièrement à l’Opéra les chorégraphies qui ont marqué le XXème siècle et invite des chorégraphes d’aujourd’hui à remonter des ballets ou réaliser de nouvelles pièces. Ainsi, depuis 1995, plusieurs oeuvres ont fait leur entrée au répertoire de l’Opéra national de Paris (Le Sacre du printemps en 1997 et Orphée et Eurydice en 2005 de Pina Bausch, Glacial Decoy de Trisha Brown en 2003, La Dame aux camélias en 2006 et Troisième Symphonie de Gustav Mahler de John Neumeier en 2009…) et de nombreux chorégraphes ont réalisé des créations pour la compagnie (Maurice Béjart, Trisha Brown, Mats Ek, William Forsythe, Susanne Linke, Jirí Kylián, Blanca Li, Wayne McGregor, Benjamin Millepied, José Montalvo, Laura Scozzi, Abou Lagraa, Carolyn Carlson, John Neumeier, Robyn Orlin, Roland Petit, Angelin Preljocaj, Saburo Teshigawara, Sasha Waltz, Alexei Ratmansky, Jérôme Bel…). Elle sollicite également des artistes plasticiens (Claude Lévêque, Olivier Mosset, Daniel Buren, Karen Kilimnik) ainsi que de nombreux danseurs de l’Opéra, auxquels elle confie des chorégraphies (José Martinez, Kader Belarbi, Jean-Guillaume Bart, Nicolas Paul, Nicolas Le Riche).

Brigitte Lefevre a produit et animé, sur France Culture, À quoi pensez-vous ? (de septembre 2008 à septembre 2009). Elle quitte ses fonctions à la tête du Ballet de l’Opéra de Paris le 1er novembre 2014. Elle est désormais Directrice artistique du Festival de danse de Cannes pour les éditions 2015 et 2017.

 

Daniel San Pedro

Formé au Conservatoire National de Madrid, Daniel San Pedro est dirigé au théâtre par Jean-Luc Revol (La Princesse d’Elide, L’heureux stratagème, La Tempête, Les trente millions de Gladiator, Al-Andalus), Fabrice Melquiot (Tarzan Boy de Fabrice Melquiot), Marcel Maréchal (Les trois mousquetaires, L’École des femmes), Gildas Bourdet (L’Atelier), Jean-Luc Paliès (Carmen la Nouvelle), Franck Berthier (La Régénération, Autour de ma pierre il ne fera pas nuit), Philippe Calvario (Grand et Petit), Ladislas Chollat (Le Barbier de Séville, Le Mariage de Figaro, Trois semaines après le paradis et Après le Paradis d’Israël Horovitz), Grégori Baquet (Les Insolites), Gaël Rabas (Les Oiseaux, Mikael Kohlaas, La Comédie des erreurs), Laurent Serrano (Il Campiello). En 2012, il est Frontin dans L’Épreuve de Marivaux signé par Clément Hervieu-Léger, joue dans la trilogie Des Femmes de Wajdi Mouawad, est Francis dans Tom à la Ferme de Michel-Marc Bouchard par Ladislas Chollat (Prix SACD de la dramaturgie francophone de France, 2011).

En 2011, il co-signe, avec Clément Hervieu-Léger, la mise en scène de Contes et recettes. En 2014, il met en scène Rimbaud l’Africain (en langue Amharique et en Français), Yerma de Federico García Lorca (Théâtre 13), Le Voyage en Uruguay de Clément Hervieu-Léger (création en novembre au CNDC à Châteauvallon, puis au Princeton French Theater Festival-USA). En janvier 2015, il co-signe, avec Brigitte Lefevre, la mise en scène des Cahiers de Nijinski (création au TOP de Boulogne-Billancourt).

Il travaille avec le chorégraphe Claude Brumachon (Y a ti ou pas) et tourne avec Paul Carpita (Marche et rêves, les homards de l’utopie et Les Sables Mouvants, film pour lequel il est nommé au Prix Michel Simon et reçoit le Prix d’interprétation au Festival du Jeune Comédien de Béziers), Michel Spinosa (Anna M.), Eliane de Latour (Les Oiseaux du ciel), Raymond Pinoteau (Noël en Quercy) Saïd Ould-Khelifa (Zabana) ou Philippe Triboit (Un Village français) ; en 2013, il tourne Le Bal des secrets pour France 3.

De 2002 à 2005, il est artiste associé au Centre National de Création de Châteauvallon (direction : Christian Tamet). Il met en scène El Romancero Gitano, À la recherche du lys, Faute de Frappe, Ziryab…

En 2010, il fonde (avec Clément Hervieu-Léger), la Compagnie des Petits champs. En son sein, sont données les créations de L’Épreuve de Marivaux, Yerma de Lorca, Ziryab, Rimbaud l’Africain et Le Voyage en Uruguay.

Il est également professeur de théâtre à l’École de Danse de l’Opéra National de Paris.

 

Production Théâtre de l’Ouest Parisien – Boulogne-Billancourt
Diffusion Théâtre de Suresnes Jean Vilar