• Saison 2017-2018
Salle Jean Vilar
1h50
Dès 14 ans

Texte et mise en scène Sophie Lecarpentier

Comment métamorphoser le monde quand la génération qui nous précède a vu s’effriter toutes ses utopies ?

Pour éclairer ce désir de changements d’une génération quarantenaire, des années 90 à nos jours, Sophie Lecarpentier s’appuie sur le roman de Flaubert et se réfère à la nouvelle vague, notamment à Truffaut.

Sept comédiens s’adonnent aux activités de leur temps, guère différentes de celles qui occupent le héros de Flaubert, Frédéric Moreau. Mais la nouvelle vague est passée par là, les histoires d’amour, les soirées, les discussions politiques ont rythmé l’esthétique de la vie. Comme dans Love, Love, Love, de Nora Granovsky ou Mélancolie(s) de Julie Deliquet, Sophie Lecarpentier dessine le portrait précis d’une génération au quotidien narcissique, qui fait avorter les grandes comme les petites ambitions.

AvecCamille Blouet, Frédéric Cherboeuf, Xavier Clion, Anne Cressent, Solveig Maupu et Julien Saada
avec les voix de Colette Nucci et Frédéric Cherboeuf.

Son Christophe Sechet
Lumières et vidéo Marinette Buchy
Costumes Solveig Maupu
Scénographie Charles Chauvet

Librement inspiré de L’éducation sentimentale de Gustave Flaubert et de Jules et Jim de François Truffaut

Nos éducations sentimentales est un texte écrit suite à des ateliers d’improvisation et d’écriture avec une troupe de comédiens avec lesquels nous avions crée « le jour de l’italienne » il y a 10 ans.

Au départ, il y a eu la relecture de L’éducation sentimentale et le sentiment d’un incroyable écho avec le monde d’aujourd’hui dont la turbulence n’a finalement que peu d’incidence sur nos quotidiens… Dans ce chef d’œuvre, Flaubert exprime l’état général qui marque les heures de transition sociale. Il décrit « un mal inconnu » qui fait avorter les grandes comme les petites ambitions, qui use, trahit, fait tout dévier, et finit par anéantir les moins mauvais dans l’égoïsme inoffensif. Et cela résonne fort avec notre époque violente. Finis les « lendemains qui chantent », épuisés les rêves et idéaux post soixante-huitards… Comment se réinventer une utopie ?

Ensuite, il y a eu l’envie de parler de notre génération, comme a pu le faire Truffaut de la sienne, de questionner le principe de construction d’une personnalité par ses amis, sa famille, son époque. Nous avons procédé par « infusion » et touches impressionnistes. Le paysage de la pièce s’est dessiné comme un tableau, le parcours initiatique s’est imposé comme une fresque nécessaire, les scènes se sont écrites comme des coups de pinceaux.
Nos éducations sentimentales raconte l’histoire de six quarantenaires qui, comme Frédéric Moreau, cherchent ce qu’ils ont eu de meilleur dans la vie, au travers des instants fugaces et des grandes décisions qui ont fait d’eux ce qu’ils sont. Un jeune rouennais arrive à Paris plein de fougue et d’envie et, pendant 15 ans, traverse la vie, grandit, enrage et se résigne, veut passionnément et renonce maladroitement, vole des baisers et laisse fuir l’amour. C’est une fresque ironique du monde contemporain, de sa violence quotidienne et de sa superficialité permanente, de sa richesse humaine et de sa tendresse intime.
Les événements nous façonnent mais ne nous changent pas. Il y a de la mélancolie dans ce spectacle, qui dit la vie humaine dans sa fragilité et sa puissance. C’est un hymne à l’homme, minuscule et si puissant par sa poésie et son imagination.

J’ai la conviction que face au monde accéléré qui nous entoure, la seule issue est de rester aux aguets, éveillés, lucides. De nous interroger ensemble, de nous confronter ensemble au monde tel qu’il va, de chercher, de rire, de pleurer, de questionner, incertains, fragiles, tâtonnants, mais ouverts. Et de proposer un regard, afin que naisse la discussion.

Nos éducations sentimentales est un spectacle photographique, un état des lieux subjectif et affectif du monde d’aujourd’hui, vu à travers le prisme d’un groupe lié par l’amitié et la complicité, valeurs salvatrices en ces temps secoués. C’est aussi le geste d’une compagnie fragile et tenace, fidèle à ses engagements et ses objectifs de théâtre public.

Sophie Lecarpentier

La vie doit être une éducation incessante : il faut tout apprendre, depuis parler jusqu’à mourir. 
Gustave Flaubert, Correspondance

 

 

Après des études de Lettres — Hypokhâgne, khâgne, DEA sur le langage dramatique de Beaumarchais (publié chez Nizet) — et une formation au Conservatoire d’Art dramatique de Rouen, en 1996, Sophie Le Carpentier crée, la Compagnie Eulalie en Normandie. Depuis son origine, la Compagnie Eulalie trouve sa spécificité dans une recherche sur la langue française et sa musicalité, associée à un ancrage profond dans le réel. Oscillant librement entre humour et gravité, pièces ludiques et textes engagés, proches du théâtre documentaire, Sophie met en scène Beaumarchais, Nathalie Sarraute, Marivaux, Vincent Delerm, Marc Delaruelle, Dieudonné Niangouna, Gérard Watkins, Catherine Anne… Elle adapte et écrit deux pièces à quatre mains avec son partenaire artistique Frédéric Cherboeuf, Too much Fight (derrière les murs), et La plus haute des solitudes (d’après Tahar Ben Jelloun) et initie un travail de troupe avec un collectif d’acteurs et techniciens qui donnera lieu à un spectacle sur les coulisses du théâtre : Le Jour de l’Italienne.
Par ailleurs elle poursuit un parcours de collaborations artistiques : récemment avec Luc Bondy, Yasmina Reza mais aussi Edouard Baer, Jean-Pierre Vincent, Louis-Do de Lencquesaing, Michèle Kokosowski, Philippe Châtel, ou Jean Dautremay. Elle participe régulièrement au Festival du Mot de la Charité-sur-Loire, et mène des résidences artistiques à l’étranger : aux Centres Culturels Français de Kinshasa et de Brazzaville (Congos), puis dans les prisons pour enfants de Roumanie avec Christian Benedetti. Elle mène actuellement une nouvelle expérience : depuis deux ans, avec Vanessa Koutseff, dans des théâtres en Bretagne et en Normandie, elle invente un objet théâtral singulier, une pièce écrite et construite au contact d’adolescents, qui propose un regard sur la jeunesse, sur sa vision de la société. Ce spectacle-performance se réinvente dans chaque lieu, chaque théâtre, avec chaque groupe d’élèves, afin de donner à cet âge transitoire la parole scénique qui lui est propre. Elle travaille parallèlement à une adaptation des poèmes de Yannis Ritsos pour une soirée performance avec Polydoros Vogiatzis et Sarah Murcia, au Théâtre Anne de Bretagne de Vannes.

Production Compagnie Eulalie. 
Coproduction Scènes du Golfe / scène conventionnée de Vannes, Le Théâtre, scène nationale / Mâcon et le Théâtre 13 / Paris.
Avec le soutien de la région Normandie, la DRAC Normandie et L’Espace Philippe Auguste / Vernon, de la salle de spectacle de Conches-en-Ouche.
Résidence de création Théâtre Paris-Villette, le Grand Parquet.